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http://www.lematin.ch/actu/suisse/andre ... mis-249721André Blattmann croit la Suisse entourée d'ennemis!
Il vient de défrayer la chronique avec ses «cours de répétition de piquet» qui ont provoqué un vent de panique dans les milieux économiques. Mais André Blattmann n'en rate pas une: cette fois, le chef de l'armée a présenté à la Commission de la politique de sécurité (CPS) du Conseil national une carte «secrète» censée mettre en évidence les dangers potentiels qui menacent la Suisse. Une carte qui provoque déjà un tollé dans la classe politique.
D'après ce document, révélé par Sonntag, les pays qui connaissent des désordres sociaux, des attentats terroristes ou des déficits budgétaires tels qu'ils risquent d'être exclus de l'Union européenne (UE) vont engendrer «des situations que nous ne pouvons même pas imaginer aujourd'hui», d'après le chef de l'armée. Dans ce contexte, on découvre l'Espagne, le Portugal, mais aussi l'Italie et la France.
Mais c'est la Grèce qui remporte la palme de la dangerosité avec une vague de réfugiés sans précédent prête à envahir la Suisse. «Ces déclarations nous surprennent», réagit Achilles Paparsenos, de la Mission onusienne grecque à Genève. «Notre gouvernement a pris des mesures d'économie contre la crise qui ont été saluées par nos partenaires de l'UE et des Etats-Unis. Nous ne croyons pas que ces peurs se basent sur une réalité.»
Fantasmes d'une autre époque
Au sein de la CPS, les critiques sont bien plus virulentes. «Nous vivons en 2010, mais ce climat dans lequel nous plonge le chef de l'armée nous rappelle les années 1920 et 1930, quand l'armée a tiré sur les grévistes à Genève et à Zurich», souligne le socialiste argovien Max Chopard-Acklin, vice-président de la CPS. A droite, la thèse d'André Blattmann n'est guère plus appréciée.
Le lieutenant-colonel bâlois Peter Malama (PLR), membre de la CPS et de l'état-major, critique vertement son supérieur: «Si déjà on planche sur des scénarios, ce qui est le cas, la pression imaginée vient d'Afrique du Nord, du Maghreb. Mais certainement pas de la Grèce.» A Zurich, Christoph Mörgeli, conseiller national UDC et ex-mentor de Christoph Blocher, rigole au téléphone. «Disons que le chef de l'armée fait preuve d'une étonnante maladresse! Un flux migratoire en provenance de la Grèce? Ce n'est pas crédible.»
Pour Ueli Leuenberger, conseiller national genevois et président des Verts, l'armée fait joujou avec des fantasmes d'une autre époque. «Ces cartes nous plongent en pleine guerre froide. Ce n'est pas si étonnant: des militaires comme Blattmann ne font que reproduire les schémas qu'ils ont appris quand ils ont commencé leur service militaire.»
«Une hypothèse»
Une seule voix est venue hier au secours du chef de l'armée. Mais encore avec des précautions de rigueur. «Il s'est exprimé en son nom, pas selon sa fonction», estime Jakob Büchler, le PDC saint-gallois président de la CPS. «Quant au scénario, il part d'une hypothèse, pas d'une réalité actuelle.»
